De l’Amour neuronal
Deux instincts
composent les forces irrationnelles qui entraînent l’homme : l’instinct de
conservation et l’instinct sexuel.
« L’homme n’est pas à l’origine de sa
propre volonté, il est créature du vouloir-vivre universel » (Schopenhauer)
L’instinct
d’autoconservation s’explique aisément par la théorie de l’Evolution (mécanisme
de hasard/sélection) puisque s’il n’existait pas, nous ne serions pas là pour
en parler.
Par contre, l’instinct
de reproduction est plus difficile à expliquer par la théorie de l’Evolution.
Pourquoi ?
Parce que ce
processus s’accomplit sur une longue
séquence (ou programme génétique, long
de 3 ans, semble-t-il) selon un enchaînement qui sent son but, (sa
finalité, comme l’exprimait la célèbre formule d’Aristote : « La
Nature ne fait rien en vain »).
Or, rappelons que,
pour la science, la Nature n’a ni buts ni fins. La preuve en est qu’elle
fait peu de cas de ses ratés, de ses régressions, de ses impasses. Restons en
donc au déterminisme scientifique qui nie l’influence des causes finales en
physique.
Chez l’Homme, la volonté, notre libre choix n'est en fait pas libre mais
déterminé par ce qui nous met en sécurité.
Rappels :
La théorie de
l’Evolution de Darwin & Wallace ne commande pas la création des instincts,
elle les explique.
Une population d’êtres
vivants a plus de chance de se perpétrer si, primo, elle a de nombreux
descendants et si, deusio, ceux-ci ont une constitution qui leur permet de s’adapter à leur
environnement. Par le hasard et grâce à cette sélection naturelle, les êtres
vivants favorisés seront ceux qui
possèdent , dans leurs gènes, un programme spécial, l’instinct sexuel qui
pousse une femelle et un mâle à se trouver, à s’accoupler et à vivre en couple
le temps d’élever leurs enfants.
Comment s’est
constituée cette séquence reste un mystère ?
Rappelons qu’il existe
des systèmes explicatifs autres que la théorie de l’Evolution ;
D’abord,
l’intervention divine mais, dit-on, « les voix de Dieu sont
impénétrables », donc, circulons, il n’y a rien à voir ;
Reste le
« libre-arbitre de la volonté » humaine qui s’oppose au déterminisme
de l’Evolution, mais que peut la volonté devant une belle femme/un bel
homme) ?
Selon Sartre, on peut
toujours dire Non dans l’absolu, mais comment s’opposer au naturel qui, comme
chacun sait, revient toujours au galop.
Revenons à la Théorie
de l’Evolution qui, selon nous, est l’explication la plus convaincante bien que
cette théorie ne soit pas, scientifiquement prouvée (selon le critère de non-réfutation de K.Popper)
Elle se base sur l’occurrence de mutations favorables. En génétique, une mutation est une
modification irréversible de l'information génétique et héréditaire contenue dans un génome et
due, par exemple, au rayonnement cosmique erratique, frappant un gamète.
On parle de mutation germinale quand la mutation porte sur
l'ADN des cellules souches d'un gamète Dans ce cas, l'embryon sera porteur de
la mutation, alors qu'aucun des parents ne la possédait dans son patrimoine génétique.
Cette explication peut sembler une
échappatoire comme celle qui justifie l’apparition d’un organe de vision aussi
complexe que l’œil humain, mais la science ne possède pas encore de
justification plus convaincante, c’est-à-dire, plus admissible ou probable.
Détaillons la séquence
de la reproduction, prétendument inventée par Dame Nature, mais, en fait,
probablement due entièrement au couple hasard/sélection.[*]
« 1°.- Le désir
sexuel qui se caractérise par un besoin pressant de satisfaction
sexuelle et qui n'est pas, nécessairement
lié à la présence d'une personne particulière.
En fonction des connaissances disponibles actuellement, on
peut expliquer la reconnaissance du partenaire et l'état d'excitation sexuelle
par les phéromones sexuelles
qui assurent les connexions entre les récepteurs olfactifs et les neurones de
l’hypothalamus qui contrôlent les hormones sexuelles).
Mais, à vrai dire, on voit mal
comment le rapprochement et le contact des zones génitales serait une phase
innée chez l’animal.
2°.- L'attraction
très spéciale pour une personne du sexe
opposé, objet de toute notre attention et de notre énergie qui se caractérise
par de l'euphorie, des pensées envahissantes
centrées sur la personne cible et
par une envie irrépressible d'être uni émotionnellement avec celle-ci. Il
s'agit, bien sûr, d'amour. [*]
3°.- L'attachement,
ou l'installation dans la durée, qui se caractérise chez les animaux par la
construction du nid, la défense du territoire et les soins mutuels, y compris
alimentaires, et chez les couples humains,
par des fonctions globalement équivalentes. Â ce stade, l'objectif est, bien entendu,
l'éducation des jeunes.
Si on inclue le temps
des soins à prodiguer à un enfant pour qu’il devienne autonome, on voit que
cette séquence instinctive de « reproduction » est étonnamment
longue ; Elle dure au moins 3 ans. » [*]
Ce programme génétique
héréditaire est , en fait, une suite d’émissions programmées d’hormones dans le
corps du violeur, du Don Juan cynique, de l’amoureux sincère ou du futur
parent, selon le cas. Ce sont :
Les phéromones dont l'effet
est faible dans l'espèce humaine, et il est surtout physiologique. Au cours de l'évolution, les
phéromones ont été remplacées par les récompenses / renforcements,
et le comportement de reproduction est devenu un comportement érotique.
L’Ocytocine est l’hormone de
l'attachement.
« Elle est
effectivement impliquée lors de l'accouchement, mais elle semble aussi, par ailleurs, favoriser les
interactions sociales amoureuses ou impliquant la coopération, l'altruisme, l'empathie,
l'attachement voire le sens du sacrifice pour autrui, même pour un autrui ne
faisant pas partie du groupe auquel on appartient. » [*]
La Dopamine et les Endorphines
sont des hormones qui actionnent les circuits de récompense.
La dopamine est responsable de la motivation,
les endorphines provoquent le désir qu'on cherche à renouveler. En ceci, son
effet s’apparente à celui de la cocaïne.
Mais la chimie des
hormones n’engendre pas le même comportement chez les hommes et chez les
femmes.
Observons un groupe
d’hommes et de femmes:
En général, un homme
en société, inconsciemment peut-être, tend à vouloir être le mâle dominant. Il
cherche à impressionner les femmes pour qu’elles aient envie de coucher avec
lui. Pour ce faire et diminuer les autres hommes présents, il doit faire état
de sa position hiérarchique enviée, de ses amis influents, de son compte en banque, de son patrimoine,
de ses beaux costumes, de sa belle auto, de sa cave à vins, de son intelligence, de son humour, de sa
force physique, de sa bonne santé, de son attendrissement pour les enfants, de
ses bonnes œuvres, de son goût pour le bricolage etc.
Il faut dire que la
compétition est dure puisqu’il y a, en chaque mâle, des milliards de
spermatozoïdes générés par jour alors qu’il n’y a qu’un ovule fécondable par
femme et par mois.
Quand le veuille ou
non, la femme, tout au moins dans les
temps anciens, était et reste encore vulnérable car si on devient une femme, on
nait femelle et ceci à cause du grand fardeau
biologique de la mise au monde d’un enfant et de son longue apprentissage.
Oui, une femme, c’est
« intéressé »… pour la bonne cause, puisque, pour elle, un « je
t’aime » est la promesse d’une assurance-vie (du moins feint-elle de le
croire)
Est-ce provocation de dire que ce sont les femmes qui ont
inventé l’Amour humain ?
Deux types d’amour :
Aimer ou être aimé
« Je
t’aime » caractérise l’instinct de reproduction qui met en jeu,
successivement et sur une longue période, le désir sexuel, l’attraction d’apparence sentimentale et
l’attachement entre 2 parents.
« Être aimé » est plutôt
l’expression de l’instinct d’autoconservation.
L’instinct
d’autoconservation se doit de précéder l’instinct sexuel, car la condition
première de propagation de l’espèce est bien qu’un individu se maintienne en
vie (Conatus) avant de pouvoir se reproduire.
Cependant, il est généralement
admis que l’instinct sexuel n’est qu’une autre facette de l’instinct de
conservation, celle qui aurait pour « but » la conservation de
l’espèce (ce qui est contestable).
Le lecteur
sentimental, choqué par cette chimie des hormones, cette camisole chimique qui
enserre l’amour, pourra se consoler en
constatant que, par le jeu de substances chimiques, le désir sexuel,
l’attraction et l’attachement se passent dans le cerveau des 2 partenaires donc dans la partie
de l’être humain la moins animale.
Constatons que l’amour
est universel, comme le souligne Lucy Vincent [*], et existe partout:
« Chez tous les peuples connus, on chante des chansons d'amour, on écrit des
poésies d'amour, on raconte des mythes et des légendes fondés sur l'amour, on
pratique la magie pour susciter l'amour
et, dans des cas extrêmes, on se suicide par amour déçu. Les mécanismes qui
contrôlent notre aptitude à tomber amoureux semblent donc bien antérieur à
l'existence des différents types de sociétés et des différents contrats de
mariage »
LES AMOURS ROMANTIQUES
ET PLATONIQUES.
Puis est apparu le
« pur amour », l’amour désintéressé, définit comme un don de soi et
une acceptation de l’autre tel qu’il est. [*]
Ce type d’amour met en
échec l’explication déterministe avancée par la théorie de l’Evolution. En
effet, il n’a pas l’effet d’unir deux personnes sexuées en vue de la
reproduction ;
Il faut faire appel à
une autre explication plutôt étayée, selon nous, par la recherche de sécurité,
c'est-à-dire une manifestation de l’instinct d’autoconservation.
.
Quels sont nos
arguments ? :
L'homme est
l'unique être vivant qui a un besoin
insatiable de se raconter des histoires.
Il a ainsi développé grandement son
imagination d'où il tire moult
satisfactions gratuites.
Exemple: l’amour romantique ou platonique, la foi religieuse
etc.
Souvent la cause de ces "romans" est
l'insatisfaction ressentie dans le temps présent.
A partir de son expérience et du contenu de sa
mémoire, l'imagination de l'homme lui
permet de bâtir des scénarios dans le but d'anticiper l'avenir selon les
hypothèses les plus favorables. En anticipant, il croit gagner une certaine
sécurité, expression de son instinct d'autoconservation.
Espérer c'est avoir la capacité de se projeter
profondément dans l'avenir, par exemple croire en une autre vie après la mort
pour calmer son angoisse existentielle.
C'est particulièrement
le cas où un homme est seul dans le désert.
Autre exemple extrême,
la condition du prisonnier qui se sent coupable et donc retranché, isolé, en quelques
sortes, du genre humain et ceci est une souffrance atroce. S’il exprime parfois des remords, c’est pour pouvoir
se réintégrer un peu.
Il a besoin de parler
avec les autres car nous avons un besoin vital
des uns des autres. D'où le succès des visiteurs de prisons, des
confesseurs ou des psychologues.
L'Autre est un relais
pour retrouver un point d'appui, première
condition pour se sentir en sécurité.
En vérité, on veut
être aimé avant d’aimer.
Heureusement, grâce au
ballet de nos hormones, tomber amoureux ne dépend pas de notre volonté.
Jean-Pierre Barret le 29/11/2010
[*] Vincent Lucy, "Comment
on devient amoureux" , Editions Odile Jacob, Paris 2004
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