lundi 25 janvier 2016


L’ESPACE SACRE



Tout groupe humain se doit de maitriser la violence potentielle de ses membres. Pour ce faire, il a besoin d’un chef garant de ses valeurs, de ses coutumes et de ses lois et qui est seul à disposer de la violence légale.
Inévitablement, le chef, tenant du pouvoir, grands-prêtre, roi et même président de démocratie finit par en abuser. Le peuple  profane, épris de liberté, lui fait alors peur.
L’instinct de conservation (conatus) du chef   porte celui-ci à se barricader dans un enclos qu’il baptise « sacré » .
Le « Sacré » dicte alors et avant tout,  ce qui est interdit et qui ne peut être transgressé sans maux ; En Islam, le mot «
Haram » signifie surtout, « interdit ».

Leur enclos sacré s’appelle  « Saint des saints », palais fastueux, châteaux-forts imprenables, demeures présidentielles somptueuses, et tombeaux grandioses (pyramides).
« Pour   l’homme religieux, l’espace n’est pas homogène, il présente des ruptures, des cassures…Il y a donc un espace sacré, et par conséquent, il y a d’autres espaces, non-consacrés et partant sans structure ni consistance pour tout dire : amorphe …», c’est-à-dire,  l’espace profane .

Or le moteur invariant de l’Histoire,   est la Liberté qui engendre l’individualisme.

Il en résulte que le sacré sera  toujours,   source d’envie  génératrice de  violence.
Je parle ici, d’enclos, de territoires comme le jardin profane qui entoure ma maison, aussi bien que de l’intérieur sacré d’une église ou d’un palais.
Une propriété immobilière,  profane ou sacrée  n’est qu’une chose virtuelle, imaginaire qui n’existe  que dans notre esprit et qui  fait l’objet d’un consensus entre “croyants”  seuls, sans valeur pour un pigeon voyageur.
La source  de « l’instinct de propriété » est  l’instinct de conservation ou plus précisément le Conatus de Spinoza.
Si on admet avec Pierre-Joseph Proudhon que « la propriété,   c’est le vol », il  n’est pas étonnant que l’espace sacré, propriété virtuelle   soit source de violences.
Ce qui déclenche l’instinct de propriété, c’est la peur des autres, plus que le désir mimétique. L’individu s’entoure alors, d’un espace protecteur, d’un « glacis » autour de lui. Constatant que l’union fait la force, il convainc ses congénères de défendre cette propriété, fusse-t-elle virtuelle comme l’oumma , l’espace sacré religieux des mahométans.

La hiérarchie religieuse a tôt fait de matérialiser cet espace virtuel sacré, par des temples (cf. les enclos paroissiaux bretons) et des droits, règlements, « commandements », livres sacrés, interdits alimentaires,   etc.

"Le premier qui, ayant clos un terrain, s'avisa de dire: Ceci est à moi, et trouva des gens assez simples pour le croire, fut le vrai fondateur de la société civile. Que de crimes, de guerres, de meurtres, que de misères et d'horreurs n'eut point épargnés au genre humain celui qui, arrachant les pieux ou comblant un fossé, eût crié à ses semblables : Gardez-vous d'écouter cet imposteur ; vous êtes perdus, si vous oubliez que les fruits sont à tous, et que la terre n'est à personne. »
« Toute  guerre nait d'une prétention commune à la même propriété », remarque  Denis Diderot

Voici un exemple, illustrant  le sacré comme  source de la violence :
Le jour de Noel 2015  à  Ajaccio, un groupe de jeunes mahométans provoque un incendie pour monter un guet-apens contre les pompiers et blessent deux soldats du feu. La population manifeste et un groupe d’excités ajacciens saccage une mosquée voisine.
Ici, il y a là,   double action violente  dont l’origine est le Sacré: la première de la part des mahométans qui considèrent probablement que Ajaccio est une ville de l’oumma sacré puisque les barbaresques maures attaquèrent les villes corses  au VII°siècle et suivants .
La seconde est celle des excités corses qui profanèrent un espace sacré mahométan.

Il n’y a pas lieu d’y voir là ,  l’effet  d’un désir mimétique cher à René Girard.

Conclusion :   Le sacré (mais pas seulement lui) est source de violence ?

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