mardi 14 mai 2013


Qu’est-ce qui nous pousse à trouver des explications à tout ?
Un sage a dit : « Tout ce que je sais, c'est que je ne sais rien», …mais il resta bien le seul à l’avoir dit !
Et l’humoriste Jean Amadou concluait  malicieusement : « chacun de nous en sait plus que Socrate, puisque nous savons au moins que Socrate ne savait rien.  »
Pourtant personne,  à part certains physiciens quantiques spiritualistes ne remet en cause le principe de causalité qui s’énonce ainsi:
« Tout phénomène à une cause et toute cause précède son effet. »
En principe, cette cause antérieure ne peut changer quand son effet s’est produit, sinon on pourrait remonter le temps.
« Plusieurs objections importantes s'élèvent contre la possibilité de la causalité inversée, dont notamment le paradoxe du grand-père, exposé par l'écrivain René Barjavel dans Le Voyageur imprudent (1943) : si je voyage dans le passé pour tuer mon grand-père, alors je ne suis jamais né, donc je n'ai pu voyager dans le passé pour tuer mon grand-père. L'effet (la mort de mon grand-père et par conséquent ma non-naissance) aurait été causé par une cause future (mon voyage dans le passé). » (Wikipédia)
Des expériences ont  montré que le bébé ressent un déplaisir quand, on simule à l’écran, la disparition  subite d’un objet comme l’image d’un hochet, sans cause apparente. 
Le bébé semble pressentir que tout effet a au moins une cause explicative

…sauf les journalistes !
Avez-vous remarqué que  tout  journaliste de bourse trouve toujours une explication aux fluctuations  erratiques du cours d’une action et même des explications changeantes d’une heure à l’autre.
Ainsi, lors de l’assassinat de Ben Laden, le 2 mai 2011, un commentateur pessimiste de la télévision américaine déclara que cette mort ne freinerait pas le terrorisme ; Une demi-heure plus tard, ce même journaliste devenu optimiste,  déclarait que cette nouvelle donnera un coup de fouet à la Bourse.
Cependant, on peut s’interroger sur la raison profonde qui pousse,  chacun de nous, a toujours produire une explication  causale  d’un phénomène.
Comme l’on sait, chacun voit midi à sa porte, et à priori nous sommes tous mus, heureusement,  par la recherche du plaisir,  de l’intérêt ou de l’utilité.
Mais le cerveau humain est  vif et impatient. Il  trouve, le plus souvent, une explication de surface, d’emblée, par intuition rapide.  Ultérieurement, le plaisir espéré d’en imposer plus surement, peut actionner notre  lente et paresseuse Raison et la pousser à rechercher des explications plus rationnelles mais au prix d’une grosse fatigue.

Qu’est-ce qui nous pousse à trouver des explications ?
Cherche-t-on à savoir :
·       Par besoin de se rassurer ?  C’est une manifestation évidente du Conatus de selon Spinoza, dans sa version primitive qui est l’instinct de conservation.
·       pour la joie de connaître et de comprendre?   C’est l’honorable curiosité!
·       pour exercer un pouvoir sur la nature et sur autrui ?  C’est inavouable !

Notre « thèse » ici, est que ces 3 types de « recherches » procèdent  du Conatus dont nous rappelons la définition donnée par Spinoza :
 « Chaque chose, autant qu'il est en elle, s'efforce de persévérer dans son être. » — Éthique III1, Proposition VI

1°.- Le besoin de se rassurer.
L’homme cherche à savoir,  par curiosité dit-on, si par de là, la colline, il y a des hommes inconnus donc, à priori menaçants. Cette curiosité n’est qu’une expression de l’instinct de conservation, c’est-à-dire du Conatus sous sa forme primaire.
D’après Nietzche la connaissance permet à l’homme, incapable d’agir et de créer, de s’imaginer un monde rassurant.
 2°- La curiosité.
Devant la très grande diversité des choses sur la terre, les anciens, quelque peu apeurés,  ont dû  éprouver un étonnement philosophique  qui poussa  les premiers penseurs  vers l’amour de la connaissance.  La curiosité est utile pour orienter les prévisions vitales, sur un mode probabiliste  sans plus, mais  on n’a jamais rien trouvé de mieux que la science pour éviter les malheurs.
Il n’en reste pas moins que la curiosité est fille du Conatus et de l’effort pour persévérer et pour augmenter sa puissance d’action, selon les propres déductions de Spinoza.

3°.- Le besoin de s’affirmer.
Savoir c’est pouvoir, dit-on. Trouver une explication, même hâtive en impose toujours aux autres, tout en les agaçant.
Les besoins  de dominer, de s’affirmer, d’être reconnu  sont, de même, des produits du Conatus spinozien.
En effet, la domination est une protection contre les prétentions des autres.
,
CONCLUSIONS
Nous avons un besoin viscérale de confort et de sécurité ce qui se traduit par le besoin obsessionnel de tout contrôler, de tout maitriser, ce qui  suppose de tout comprendre pour tout expliquer, par intuition, donc sans effort.

Un bon moyen est de se raconter des histoires, nous adorons les histoires ; il suffit qu’elles soient cohérentes, et qu’elles finissent bien.
L’exercice de la raison consomme trop d’énergie psychique, alors qu’à l’inverse,  l’intuition fonctionne automatiquement et rapidement, presque sans effort.
« Nous pensons avec notre corps, par les émotions au lieu de penser avec votre cerveau »*
Et de plus, intuition et émotions sont à la mode, de nos jours !

Cependant :
Méfions-nous de la première impression, ce n’est pas la bonne !
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* « Système 1, système 2. Les deux vitesses de la pensée », Kahneman Daniel, Flammarion, Paris 2012
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13 mai 2013           jeanpierrebarret@free.fr      explication_causale_jpb.doc

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